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PRESENTATION

DU POLE DE RECHERCHE

- Diane Semerdjian

Interview de Diane Semerdjian,

analyste en relations internationales

et chargée de recherche d'Alhawiat

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Pour quelles raisons développer un pôle recherche au sein d’Alhawiat ? 

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Les témoignages des femmes que Chloé a rencontré au Liban sont une base essentielle pour le travail que j’effectue et orchestre pour le pôle de recherche.

Nous avons estimé toutes les deux que leurs portraits devaient être contextualisés et qu’ils devaient être le point de départ d’une réflexion plus large sur les mécanismes de résilience qu’elles utilisent. Pour donner une juste place à leur parole, il est ainsi souhaitable d’en extraire les thématiques qu’elles révèlent, et de les soumettre à une pensée multidisciplinaire pour aboutir à la construction d’une mémoire éloignée des vérités institutionnelles. A travers le curseur de leurs mots, mon rôle est d'identifier quel(le) auteur(e) est le plus à même d’ouvrir un débat de société sur ce qu’elles ont voulu dire. L’approche bottom-up, partant de l’intime pour arriver au collectif, est très utile parce qu’elle permet de tenir l’élitisme à distance. La « recherche » est un terme qui doit être entendu dans sa globalité. Les chercheurs et chercheuses en sciences sociales, en ethnologie, ou en sciences politiques et relations internationales sont donc invités à contribuer à Alhawiat en partageant et en simplifiant la production de leur savoir. Mais pas seulement : archéologues, psychanalystes, artistes, écrivains, acteurs de la société civile… Tant d’hommes et de femmes participent à mettre en lumière les femmes du Moyen-Orient autrement. Nous voulons des angles d’approche nouveaux.

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Quelles sont les nouvelles approches revendiquées par Alhawiat ? 

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Ces nouvelles approches partent de constats spécifiques : les conférences sur le Moyen-Orient sont devenues trop fermées à d’autres regards qui peuvent pourtant s’avérer complémentaires.

Au-delà, ce qui relate des femmes au Moyen-Orient est souvent pollué par le fantasme de la femme soldat kurde, le cliché de la femme réfugiée voilée et désespérée, ou encore de la femme chrétienne d’orient en rupture avec le monde arabo-musulman (ou autres lieux communs éreintants). Alhawiat veut montrer la diversité et la richesse des rêves, des propos, et des luttes qui irriguent la région. Pour une thèse ou un mémoire, pour un livre revendiquant une approche scientifique, l’épistémologie et les cadres conceptuels sont utiles. Pour Alhawiat,  nous avons voulu revendiquer une forme de parole libre.

La rubrique Brain permet d’interpeler un public large : la vidéo est un vecteur contemporain de communication très fort. La personnalité invitée a deux minutes pour expliquer son action, son travail, ou sa recherche, et faire le lien avec une forme de résilience qu’elle a exploré ou vécu.  Au-delà, des participations écrites et des interviews plus longues pour ceux qui veulent approfondir sont prévues, et correspondent à la rubrique "Thinking". Le même rapport d’interdisciplinarité est requis.

Une dernière rubrique "News" permet au lecteur d’avoir un suivi de nos évènements, notamment les conférences qui seront organisées à partir de Mars 2018. Quant au feed Facebook, il permet de suivre une actualité quotidienne sur ce qui concerne les femmes qui vivent dans des sociétés conflictuelles, en guerre, ou post-conflit au Moyen Orient. Il peut aussi relayer des initiatives ou des faits de sociétés qui nous ont marqué. 

La première conférence traitera par exemple de la foi comme vecteur de résilience après un traumatisme de guerre. Les échanges auront pour socle les témoignages des femmes de Qaa dont Chloé a recueilli le témoignage, et qui ont toutes perdu un mari ou un fils lors d'attentats suicides qui ont secoués le Liban. Elles ont exprimé l’importance de la communauté, de la martyrologie, du passage par l’Eglise comme un rituel témoin de leur survie quotidienne. Elles évoquent la foi comme un lieu de résilience, certes, mais comme un lieu de résistance à la peur également. 

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C’est quoi un vecteur de résilience ? 

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Le terme peut paraitre un peu générique. Pourtant Boris Cyrulnik en a une définition très claire et c’est sur celle-ci que repose le projet d’Alhawiat. 

"No one pretends that resilience is a solution to happiness.

It's a fight strategy against grief, that allows to grab away pleasure to live, despite the whispering of ghosts deep in your memory" 

 

La résilience c’est la capacité à faire face à une situation traumatique. Se développe alors des formes de résistance diverses  qui peuvent  prendre la forme de l’ultra-réalisme, du cynisme ou du rejet. A contrario, elle peut aussi s’exprimer par la joie, par la foi, par le culte, par la lutte politique ou armée, par l’art (musique, écriture, peinture, etc). Tant de pistes à explorer, et tant d’imagination déployée par les femmes dont parle Alhawiat pour survivre à la fragilité du territoire qu’elles habitent et à la précarité de leur situation. 

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Quels sont les premiers contributeurs au projet ? 

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Il est utile ici de remercier les personnes qui m’ont aidé à conceptualiser le contenu du pôle recherche. Tout d’abord Chloé Sharrock, qui par ses idées et ses inspirations quotidiennes, imprègne aussi de sa marque l’élaboration de ce pôle de réflexion ambitieux. Mais aussi mes anciens professeurs qui sont restés fidèles à mon travail, lecteurs attentifs et communiquant précieux. Je pense à Daniel Meier, chercheur associé à l’IFPO et au laboratoire PACTE de Grenoble, ainsi qu’à Vincent Legrand du CECRI et GERMAC de Louvain-la-Neuve où j’ai réalisé mon premier stage. Karim Bitar de l’IRIS et de l’Université Saint-Joseph qui a communiqué sur le projet et constitué une de nos première « caution » intellectuelle quand nous n’étions encore qu’une page Facebook. Et enfin des femmes hors du commun, comme Sonia Dayan Hezbrun, professeure émérite de l’Université Diderot,  Nour Farra Haddad de l’USJ, ou encore Carole Mann de Women in War.

Du côté journalistique, Jean-Michel Morel et Alain Gresh, ont su nous donner de la force en lisant et regardant notre travail et en imaginant un partenariat à venir avec Orient XXI. Je remercie également l’ANAJ-IHEDN  et notamment la présidente du pôle Moyen Orient, Fadila Leturc qui dès qu’elle trouve le temps apporte sa pierre à l’édifice et permet d’acter notre premier partenariat.

Nous avons aussi une belle petite équipe de traducteurs volontaires et bénévoles qui nous aide à avancer et à retranscrire en anglais et en français les témoignages que l’on souhaite mettre en avant : Kenza Chaouni, Jameel Karaki et Kamar Mokhabir. 

Nous remercions également tous les donateurs de la campagne de crowdfunding qui nous a permis de constituer nos premiers fonds (1300 euros) et de tranquilliser les frais attenants à l’association.

Surtout, nous remercions les femmes qui ont et vont témoigner, car elles sont assurément la colonne vertébrale d’Alhawiat. 

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